Vaincre la morosité de l’hiver grâce à la lumière !
Lorsque j’ai débuté mes activités avec mon entreprise Du soleil plein la tête en 2005, la plupart des gens ne connaissaient pas la luminothérapie. Aujourd’hui, lorsque je propose des conférences pour le large public, les gens veulent en savoir davantage s’ils ont fait un bon choix d’appareil et s’ils l’utilisent correctement. Bref, ce traitement lumineux a su s’implanter dans notre mode de vie à la vitesse de la lumière !
Mais un peu d’histoire, saviez-vous que le lien entre l’effet de la lumière sur les humeur a été relaté dans des écrits datant d’aussi loin que 4700 ans avant Jésus-Christ par Wong Tai ainsi que par Hippocrate, le père de la médecine, 400 ans avant Jésus-Christ ? Malgré son origine ancestrale, la première étude contrôlée sur l’effet antidépresseur de l’administration de lumière artificielle vive a été menée par Dr Norman Rosenthal dans les années 80, véritable pionnier d’un domaine de recherches en ébullition. Au départ, la luminothérapie était surtout utilisée pour contrer les effets du trouble affectif saisonnier (TAS) ou dépression saisonnière, qui amène des symptômes similaires à ceux de la dépression, survenant à l’automne et disparaissant de façon naturelle au printemps.

Concrètement le traitement de luminothérapie consiste simplement à s’exposer quotidiennement à une lumière artificielle de couleur blanche, dite « à large spectre », imitant celle du soleil, pour traiter principalement les troubles associés au dérèglement de l’horloge biologique interne, comme la dépression saisonnière. Plusieurs appareils de luminothérapie sont en vente libre sur le marché et il est important d’être prudent quant au choix de l’appareil.
La luminothérapie fait partie de la grande famille des photothérapies qui utilisent certaines sources lumineuses (intensités et couleurs diverses, laser, etc.), parfois combinées à des photosensibilisants, pour soigner toutes sortes d’affections, en particulier les maladies de la peau.
Conseils d’utilisation d’un appareil de luminothérapie
Plusieurs se questionnent sur le bon choix d’un appareil de luminothérapie et la bonne façon de l’utiliser à la maison. Son utilisation est relativement simple.
Concrètement, il s’agit de s’exposer le matin à une source contrôlée de lumière artificielle de large spectre (c’est-à-dire de couleur blanche) pour une durée de 20 à 30 minutes. La lampe doit diffuser une intensité lumineuse de 10 000 lux. En comparaison, un bureau bien éclairé peut diffuser 300 lux, une journée nuageuse est d’environ 2 000 lux, alors qu’une magnifique journée ensoleillée l’été est d’environ 100 000 lux. Le standard cliniquement recommandé et reconnu est une exposition lumineuse à 10 000 lux, au niveau des yeux, à une distance d’environ 50 cm, d’une durée de 30 minutes, et ce avant l’apparition des symptômes, soit vers le mois d’août et jusqu’au printemps. Certaines personnes ressentent également le besoin de faire quelques traitements durant l’été, selon l’ensoleillement extérieur..
30 minutes d’exposition au lever à une lampe de luminothérapie d’intensité de 10 000 lux est la recommandation des experts
Marie-Pier Lavoie, psychologue et spécialiste de la dépression saisonnière et ses traitements
En plus de la forte intensité lumineuse, les lampes de luminothérapie possèdent un spectre lumineux spécifique et sont munies d’un filtre ultraviolet (UV), donc pas de danger de bronzer sous la lampe! Il faut également savoir que l’effet thérapeutique de la lumière passe par les yeux et non la peau, il est donc essentiel de garder les yeux ouverts lors du traitement. Notez qu’il n’est pas nécessaire de fixer les tubes fluorescents de votre lampe de luminothérapie durant le traitement et qu’il est plus agréable de faire une activité comme lire, déjeuner ou même vous maquillez ! Généralement, c’est après environ une semaine d’utilisation régulière que vous pourrez observer une augmentation de l’énergie et du bien-être, comme chez 60% à 80% des utilisateurs.
Est-ce que la luminothérapie est efficace et sécuritaire ?
Plusieurs études démontrent qu’après une semaine d’utilisation régulière, il est possible d’observer une augmentation de l’énergie et du bien-être chez 60% à 80% des utilisateurs. Il est préférable de commencer le traitement à la fin de l’été, avant l’apparition des symptômes et de le poursuivre tout l’automne et l’hiver jusqu’au début du printemps, car les rechutes sont rapides.
Les effets bénéfiques de la lampe de luminothérapie s’étendent également à d’autres troubles dont la boulimie, le syndrome prémenstruel, la dépression non-saisonnière, les troubles du sommeil et le décalage horaire.
Mes études doctorales effectués à l’Institut Universitaire en Santé Mentale de Québec ont permis d’amener un éclairage nouveau sur le processus thérapeutique de la luminothérapie. En effet, avec le Dr Marc Hébert, nous avons mesuré la sensibilité rétinienne d’un groupe témoin et d’un groupe de gens atteints de dépression saisonnière. Il a été montré que la sensibilité rétinienne des gens affectés de dépression saisonnière se rétablissait à l’été, lors de la rémission naturelle ou suite à quatre semaines de luminothérapie durant la phase dépressive. Ainsi, ma thèse illustre la première preuve biologique de l’action efficace de la luminothérapie !
Les effets secondaires sont rares, mais certaines personnes peuvent ressentir des maux de tête ou des irritations aux yeux. Pour contrer ces problèmes, il s’agit de diminuer l’intensité lumineuse en s’éloignant de la lampe et en raccourcissant la durée d’exposition. De plus, si vous vous exposez trop tard durant la journée, il est possible que vous vous sentiez agité le soir ou la nuit, pour cette raison, il est préférable de faire le traitement en avant-midi.
Concernant les éventuels dommages oculaires résultant de l’utilisation de la luminothérapie, une étude s’est penchée sur l’évaluation ophtalmologique avant et après un traitement allant de deux semaines à six ans chez 50 patients atteints de TAS et utilisant ce traitement de façon quotidienne à 10 000 lux. Les résultats ne démontrent pas de changements oculaires après un traitement à court, moyen ou long terme. De même, une seconde étude longitudinale ne démontre pas de modifications ou de dommages rétiniens suite à l’utilisation chronique de luminothérapie.
Au niveau des contre-indications à l’utilisation de la luminothérapie, les spécialistes s’entendent pour éviter ce traitement chez les gens souffrant de rétinite pigmentaire, de glaucome, de cataracte ainsi que d’autres maladies pouvant affecter la rétine (par exemple, le diabète). Aussi, les gens prenant des médicaments aux effets photosensibles, dont le lithium, ne peuvent utiliser ce traitement par la lumière. Finalement, les personnes âgées ayant des risques de dégénérescence maculaire sont exclues du groupe de personnes pouvant bénéficier de la luminothérapie.
Saviez-vous que?
Lorsqu’un appareil de luminothérapie est prescrit par un professionnel de la santé, certaines compagnies d’assurances remboursent le coût?
Vérifiez avec votre médecin les démarches à effectuer et la pertinence pour vous d’utiliser ce traitement pour améliorer votre condition.

Éclairage sur les multiples bienfaits de la luminothérapie
La principale application de la luminothérapie, et également celle qui est le mieux documentée scientifiquement, concerne la dépression saisonnière hivernale. Ce syndrome saisonnier apparaît lors de l’approche de la saison froide, à mesure que diminue la clarté extérieure.
La luminothérapie pourrait aussi avoir des vertus préventives face à ces mêmes problèmes, entre autres pour les personnes qui, chaque année, ressentent une légère « déprime hivernale » ou celles qui travaillent toute la journée sans voir la lumière du jour, que ce soit dans un bureau ou en usine. Le Dr David Servan-Schreiber en fait état, entre autres, dans son livre Guérir tout comme le Dr Norman Rosenthal dans Soif de lumière.
Alors, si votre moral ou votre énergie n’est pas affecté par le manque de lumière à l’automne ou à l’hiver, il n’est sûrement pas nécessaire de recourir à la luminothérapie. Par contre, pour une personne sur 5 dans notre population canadienne, la luminothérapie pourrait vous aider à contrer ce blues de l’hiver.
On emploie également la luminothérapie pour contrer d’autres symptômes pouvant être associés à un dérèglement de l’horloge biologique interne comme les troubles du sommeil et le syndrome prémenstruel ou pour combattre les problèmes attribuables au décalage horaire ou au travail de nuit. Elle pourrait également être utile dans certains cas de dépression comme le post-partum (à la suite d’un accouchement) ou la dépression non-saisonnière chez les personnes âgées.

Simulateur d’aube
Le simulateur d’aube reproduit les conditions d’un lever de soleil, et sert de réveille-matin. Plutôt que d’être tiré du sommeil brusquement par une alarme ou la radio, l’appareil vous éveille en douceur en commençant à éclairer progressivement la chambre, à une heure préprogrammée. Par exemple, pour un lever à 7 h, la lumière pourra s’allumer doucement dès 6 h ou 6 h 30, et atteindre son maximum d’intensité à 7 h. Cependant, ce type d’appareil ne constitue par un traitement par luminothérapie en soi, mais plutôt une façon « lumineuse » de se réveiller. Chez certaines personnes, elle améliorerait les symptômes d’insomnie ou de dépression, mais peu d’études se sont penchées sur la question. Pour les gens souffrant réellement de dépression saisonnière, un traitement plus intense grâce à une lampe spécialement conçue à cette fin (10 000 lux) est recommandée plutôt qu’un simulateur d’aube, mais rien n’empêche d’utiliser conjointement les deux.
Comment choisir une bonne lampe de luminothérapie ?
Vous pouvez vous procurer une lampe dans la plupart des pharmacies, les magasins grandes surfaces et sur le web entre autres.
Afin de faire un bon choix, il est important de considérer l’intensité lumineuse de l’appareil, afin qu’il soit assez puissant. Les experts recommandent une intensité de 10 000 lux avec un large spectre lumineux, c’est-à-dire de couleur blanche. De plus, afin que le traitement soit efficace, vous devez avoir un appreil assez large pour que votre visage entier soit baigné par la lumière.
Pour bien choisir sa lampe de luminothérapie, vous devez considérer 3 critères indispensables :
1. Une intensité lumineuse de 10 000 lux
2. Un large champs lumineux (méfiez-vous des lampes portatives trop petites)
3. Une lumière blanche *
*Attention à la technologie DEL (diode électro-luminescence) qui utilise les longueurs d’ondes bleues. Moins dispendieuse, les DEL comportent l’avantage d’être plus efficace puisque l’œil humain est plus sensible à la longueur d’ondes bleues. Cependant, certaines études montrent qu’à long terme, elles pourraient être dommageables pour la rétine. Les spécialistes du domaine sont donc prudents et recommandent l’utilisation de lampes de luminothérapie ayant déjà fait leur preuve et ayant été testés à long terme.
*Marie-Pier Lavoie n’a pas d’intérêts financiers dans les compagnies qui fabriquent ces appareils et n’assume aucune responsabilité à l’égard de ces produits.
Références utiles
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